Le XIXe siècle a donné naissance aux ports industriels, en raison de la présence croissante des navires à vapeurs dans des bassins vastes et bétonnés, de l’invasion des grues mécaniques, des docks-entrepôts et des voies ferrées sur les quais, ou encore des premières expériences de « sidérurgie sur l’eau ». Sous la pression conjuguée de la révolution industrielle et de la mondialisation, les grands ports de commerce français ont connu des mutations techniques et économiques sans précédent. Cette adaptation était la condition sine qua non pour qu’ils s’insèrent dans les nouvelles logiques du commerce international et qu’ils demeurent compétitifs dans un univers de plus en plus concurrentiel entre grands organismes portuaires européens pour la captation des trafics maritimes et terrestres. Cet ouvrage, qui se concentre sur les 16 principaux établissements nationaux, est en premier lieu une réflexion sur une forme de contrainte nouvelle, que nous avons désignée par l’expression de « logique d’adaptation permanente ». Elle procéda d’une dynamique innovatrice qui a fait entrer les ports de commerce dans l’ère des « travaux perpétuels » et les a conduits, dans le cas français, à s’insérer dans le commerce international selon des modèles de croissance régionaux spécifiques.
Toutefois, le processus de modernisation des grands établissements nationaux a présenté des défaillances qui ont provoqué leur déclassement relatif dans la hiérarchie européenne. Elles se sont traduites par un sous-dimensionnement chronique des infrastructures et des lacunes croissantes en matière d’équipement, qui ont conduit à s’interroger sur le relatif échec de la politique portuaire entre 1815 et 1914. L’insertion plus ou moins bien réussie des ports français dans la mondialisation du XIXe siècle a également posé la question de leurs options respectives à propos de la conquête des marchés ultramarins et continentaux. Pouvant être considérés comme les premières plateformes logistiques de l’ère contemporaine, les ports du XIXe siècle inaugurèrent également l’ère de l’industrialisation lourde littorale. Cette dernière représenta autant une contrainte supplémentaire en matière d’aménagement des territoires portuaires qu’une nouvelle opportunité de développement économique à long terme.
Introduction générale. Pour une histoire globalisée des ports
PREMIÈRE PARTIE : Innovation et croissance : Une nouvelle économie portuaire française
Chapitre 1 : Les ports à l’épreuve de la mondialisation du XIXe siècle
I. Les impulsions exogènes : les mutations de l’économie maritime et du système de transport
II. La nouvelle loi du développement portuaire : la logique d’adaptation permanente
Chapitre 2 : L’insertion dans le commerce international : les modèles régionaux de croissance portuaire
I. Les composantes du modèle de croissance portuaire
II. Les trois modèles régionaux de croissance portuaire au XIXe siècle
Conclusion de la première partie
DEUXIÈME PARTIE : Politique des ports : les défaillances du triangle institutionnel
Chapitre 3 : L’illusoire solidarité des intérêts portuaires
I. Des élites locales sensibles aux enjeux de la modernisation portuaire
II. La montée en puissance des chambres de commerce maritimes
III. La difficile naissance d’un lobby portuaire
Chapitre 4 : Ambitions et limites de l’expertise technique
I. Des ports d’ingénieurs : les Ponts et Chaussées en action
II. Fonctionnaires de l’Etat ou bienfaiteurs locaux ?
III. De l’utilité des ports dans la pensée économique des ingénieurs
Chapitre 5 : Les hésitations de la politique portuaire
I. L’introuvable doctrine portuaire
II. Le sous-investissement portuaire et ses effets
Conclusion de la deuxième partie
TROISIÈME PARTIE : Dynamiques portuaires : conquête des marchés et industrialisation
Chapitre 6 : L’avant-pays : la reconquête des marchés ultramarins
I. Des horizons traditionnels aux nouveaux circuits de l’échange international
II. Les outils des négoces portuaires
III. Déclin portuaire et crise de la marine marchande
Chapitre 7 : L’arrière-pays : la lutte pour la conquête des marchés continentaux
I. La dimension économique : un nouvel impératif de la croissance portuaire
II. La dimension tarifaire : le rôle discriminant des tarifs ferroviaires et des droits portuaires
Chapitre 8 : L’industrialisation portuaire : une nouvelle source de trafic
I. Continuités et renouvellement de l’industrie héritée
II. La nouvelle industrialisation portuaire ou l’industrie importée
Conclusion générale. Les ports, l’État et l’économie française
Sources et bibliographie
Annexe 1. Dépenses extraordinaires consacrées aux ports
Annexe 2. Infrastructures et outillage des ports français
Annexe 3. Avant-pays des grands ports de commerce
Annexe 4. Evolution du trafic des seize grands ports de commerce français
Annexe 5. Répartition des trafics portuaires selon le type de flotte
Glossaire / Table des documents